Renard
On pourrait le croire assoupi, le pelage flamboyant offert aux douces caresses d’un soleil estival….
Peu probable au vu de l’intense et bruyante activité automobile !
Goupil gît sur le flanc, très certainement victime d’une calandre indifférente à la faune sauvage. Un mince filet de sang pourpre ne laisse aucun doute. La bête est morte.
Qu’est-elle venue chercher dans cette ville bruyante où les poulaillers ont, depuis de nombreuses saisons, cédé la place aux espaces mortifiés de l’urbain? Un corbeau crédule, un fromage haut perché, une cigogne rusée, des raisins trop verts?
Peut-être cherchait-elle un petit prince, une rose ?
Nul ne connaîtra jamais l’objet de sa quête. L’imaginaire évoquera la traque d’une proie incertaine, l’errance d’un animal blessé, l’égarement d’un canidé malade …
Le rouquin est allongé, le corps avachi, blotti contre un mur gris. Un coup d’œil derrière l’enceinte … des bouquets délavés, des fleurs desséchées par des jours de canicule, des corolles et du granit, des croix dressées et des hommages couchés. Un cimetière d’humains.
Osmose des silences immobiles.
On voudrait que cesse le vacarme des moteurs fumants.
Au pied du mur d’enceinte, adossé à notre renard, une pierre tombale luisante. On pense à la sépulture d’un Nemrod, un pauvre chasseur victime de la folie d’un automobiliste au retour d’une battue dominicale, d’une chasse au renard.
Si l’épitaphe du pauvre homme ignorant St Christophe rend un vibrant hommage à St Hubert, patron de sa confrérie, celle de l’animal aventureux persiste à affirmer que l’essentiel est invisible pour les yeux.
Simple différend philosophique pour une semblable destinée.
jicé baverel
août 2013